Les taux d'intérêt plus élevés ont eu un impact sur l'économie et l'inflation, bien que plus lentement que prévu, reconnaît la Banque du Canada, qui maintient le cap pour le moment et promet même de relever les taux encore si nécessaire.
Comme prévu, la banque centrale canadienne a laissé inchangé son taux directeur à 5 % mercredi, marquant ainsi la deuxième fois consécutive. Confrontée à une inflation galopante, elle a déjà relevé les taux 10 fois depuis mars 2022, les faisant passer de 0,25 % à leur niveau actuel, le plus élevé depuis avril 2001.
La Banque du Canada estime que dans la fourchette de 2 % à 3 %, son taux directeur a un effet neutre sur la consommation des ménages et l'investissement des entreprises. En dessous de cette fourchette, sa politique monétaire les stimule ; au-dessus, elle freine la demande (et par conséquent, la croissance des prix).
"L'inflation a considérablement diminué depuis l'été 2022, mais comme tout le monde le sait, elle est encore trop élevée", a déclaré le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, lors de l'annonce de la décision de l'institution et de la présentation d'une nouvelle vue d'ensemble de la situation.
"Nous avons maintenu le taux directeur au même niveau car la politique monétaire ralentit l'économie et atténue les pressions sur les prix, et nous voulons lui laisser le temps de faire son travail. Cependant, la baisse de l'inflation devrait se poursuivre lentement, et les risques inflationnistes ont augmenté."
Comme signe de la lenteur de sa lutte contre l'inflation, la banque centrale a été contrainte de réviser à la hausse ses prévisions d'inflation depuis juillet. Bien qu'elle s'attende toujours à ce que le coût de la vie revienne à sa cible de 2 % d'ici 2025, elle reconnaît que l'inflation restera probablement plus élevée qu'elle ne le pensait, avec une moyenne d'environ 3,5 % d'ici la mi-prochaine année.
Néanmoins, il y a eu des améliorations. Passant de 8,1 % en juin 2022, l'augmentation annuelle de l'indice des prix à la consommation a fluctué entre 2,8 % et 4 % ces derniers mois.
La hausse des prix des biens sensibles aux taux d'intérêt, tels que les meubles et les appareils électroménagers, ainsi que d'autres articles tels que les vêtements et les chaussures, est déjà revenue à 2 % ou moins. Bien qu'elle soit encore élevée, l'inflation alimentaire est désormais de 6 % et devrait continuer de baisser.
D'un autre côté, les coûts du logement ont continué d'augmenter, atteignant une hausse de 8 % sur trois mois, en raison non seulement des taux d'intérêt de la Banque du Canada, mais aussi des pénuries chroniques d'offre par rapport à la demande. Les prix de l'essence ont également repris leur hausse en raison de la montée des prix mondiaux du pétrole.
La croissance des salaires reste forte (entre 4 % et 5 % sur un an), et les entreprises continuent d'augmenter leurs prix plus fréquemment et de manière plus substantielle qu'auparavant, ce qui fait que l'inflation fondamentale n'a baissé que légèrement, passant un peu plus de 5 % en 2022 à un peu moins de 4 % au milieu de cette année.
L'augmentation des taux d'intérêt par les banques centrales au Canada et dans le monde a déjà un impact sur la vigueur économique. Selon la Banque du Canada, la croissance économique canadienne n'a été que de 1 % en moyenne au cours de la dernière année et devrait rester faible pendant au moins une autre année avant de rebondir vers la fin de 2024.
Avec une croissance économique aussi faible, il ne faut pas s'étonner si le Canada connaît "deux ou trois trimestres légèrement négatifs", a déclaré Tiff Macklem lors d'une conférence de presse.
Cependant, cela ne signifie pas nécessairement "une forte baisse de la production et une augmentation significative du chômage auxquelles les gens pensent lorsqu'ils entendent parler d'une récession".
"Il est depuis longtemps dit que le chemin vers un atterrissage en douceur sera étroit. Et ce chemin est devenu encore plus étroit", a-t-il ajouté, tout en exprimant sa disposition à augmenter à nouveau le taux directeur si l'inflation fondamentale ne montre pas de signes de retour vers la cible de 2 %.
Les gouvernements au Canada pourraient aider leur banque centrale en évitant de stimuler une demande supérieure à l'offre disponible. Cependant, cela pourrait être le cas l'année prochaine si leurs dépenses et leurs investissements suivent leurs promesses (+2,5 %). "Ce serait plus facile si la politique monétaire et la politique fiscale allaient dans la même direction", a noté le gouverneur.
Une chose est certaine : la Banque du Canada ne commencera pas à réduire les taux d'intérêt tant qu'elle ne sera pas convaincue que l'inflation est en bonne voie de revenir à sa cible, a indiqué Tiff Macklem. Et les possibles répercussions des nouvelles tensions entre Israël et le Hamas sur les prix du pétrole suscitent des craintes que ce processus ne prenne plus de temps que prévu.
L'augmentation des taux d'intérêt à long terme sur les marchés obligataires à des niveaux jamais vus depuis 2007 suggère que les taux de la Banque du Canada resteront élevés pendant longtemps, a observé l'économiste James Orlando, de la Banque TD,